
LES ESSENTIELS DU JOUR
BIENNALE DE VENISE 2024
Nil Yalter et Anna Maria Maiolino Lionnes d’or
QDA 06.11.23 N°2705

Ce sont à nouveau deux femmes qui se voient récompensées par un Lion d’or pour l’ensemble de leur carrière. Après l’Allemande Katharina Fritsch et la Chilienne Cecilia Vicuña en 2022, la 60e Biennale de Venise a choisi la Franco-Turque Nil Yalter (née en 1938 au Caire, d’où son prénom) et l’Italo-Brésilienne Anna Maria Maiolino (née en 1942 à Scalea, Calabre) pour recevoir ce prix prestigieux, approuvé par le conseil d’administration de la manifestation, encore présidé par Roberto Cicutto (il sera remplacé en 2024 par le journaliste d’extrême droite Pietrangelo Buttafuoco), sur la recommandation du Brésilien Adriano Pedrosa, commissaire de la prochaine exposition internationale de la biennale.
Sous le titre « Foreigners Everywhere » (Étrangers partout) – qui fait écho à un mouvement antiraciste turinois des années 2000 et à une série d’œuvres de Claire Fontaine –, celle-ci affirme avec courage, dans une Italie dirigée par le parti néo-fasciste Fratelli d’Italia, la volonté de mettre l’accent « sur les artistes qui ont voyagé et migré entre le Nord et le Sud, l’Europe et au-delà, et vice versa.
En ce sens, mon choix se porte sur deux femmes artistes extraordinaires, pionnières, également migrantes », indique le commissaire.
Nil Yalter et Anna Maria Maiolino, la première ayant émigré du Caire vers Istanbul avant de s’installer à Paris, et la seconde ayant rejoint le Venezuela puis le Brésil où elle intègre le mouvement « nouvelle figuration » et où elle vit actuellement, incarnent ces bouleversements culturels, liés à l’arrachement identitaire et aux conditions de vie des minorités.
Nil Yalter (qui a bénéficié d’une rétrospective au MAC VAL en 2019 et a participé cette année à l’exposition « Signals: How Video Transformed the World » au MoMA) est l’une des pionnières de l’art vidéo féministe, soutenue à ses débuts par Suzanne Pagé et Dany Bloch qui l’exposent à l’ARC. Ses œuvres manifestes croisent la vidéo, la photographie, le dessin et l’écriture en documentant les habitations provisoires des quartiers pauvres d’Istanbul, les prisons de femmes ou l’immigration des familles turques à Paris, sujet de sa série « Exile Is a Hard Job » (1974-2023) qui sera l’objet de son installation à la Biennale de Venise aux côtés de sa yourte emblématique installée au musée d’Art moderne en 1973. « Des sujets sur la défense des femmes et la perte d’identité qui la poursuivent toute sa vie », développe Odile Aittouarès (Galerie Berthet-Aittouarès), qui a rencontré l’artiste en 2018 alors qu’elle était primée par l’association AWARE et qui vient d’ouvrir une exposition dans sa galerie (jusqu’au 9 décembre).
Tout aussi radicales, les œuvres picturales et performatives d’Anna Maria Maiolino ont dénoncé sans relâche la dictature militaire, la censure et la précarité. À la biennale, elle présentera une nouvelle œuvre de grande envergure qui poursuit sa série de sculptures et d’installations en argile débutée dans les années 1990.
JULIE CHAIZEMARTIN
Ce sont à nouveau deux femmes qui se voient récompensées par un Lion d’or pour l’ensemble de leur carrière. Après l’Allemande Katharina Fritsch et la Chilienne Cecilia Vicuña en 2022, la 60e Biennale de Venise a choisi la Franco-Turque Nil Yalter (née en 1938 au Caire, d’où son prénom) et l’Italo-Brésilienne Anna Maria Maiolino (née en 1942 à Scalea, Calabre) pour recevoir ce prix prestigieux, approuvé par le conseil d’administration de la manifestation, encore présidé par Roberto Cicutto (il sera remplacé en 2024 par le journaliste d’extrême droite Pietrangelo Buttafuoco), sur la recommandation du Brésilien Adriano Pedrosa, commissaire de la prochaine exposition internationale de la biennale.
Sous le titre « Foreigners Everywhere » (Étrangers partout) – qui fait écho à un mouvement antiraciste turinois des années 2000 et à une série d’œuvres de Claire Fontaine –, celle-ci affirme avec courage, dans une Italie dirigée par le parti néo-fasciste Fratelli d’Italia, la volonté de mettre l’accent « sur les artistes qui ont voyagé et migré entre le Nord et le Sud, l’Europe et au-delà, et vice versa.
En ce sens, mon choix se porte sur deux femmes artistes extraordinaires, pionnières, également migrantes », indique le commissaire.
Nil Yalter et Anna Maria Maiolino, la première ayant émigré du Caire vers Istanbul avant de s’installer à Paris, et la seconde ayant rejoint le Venezuela puis le Brésil où elle intègre le mouvement « nouvelle figuration » et où elle vit actuellement, incarnent ces bouleversements culturels, liés à l’arrachement identitaire et aux conditions de vie des minorités.
Nil Yalter (qui a bénéficié d’une rétrospective au MAC VAL en 2019 et a participé cette année à l’exposition « Signals: How Video Transformed the World » au MoMA) est l’une des pionnières de l’art vidéo féministe, soutenue à ses débuts par Suzanne Pagé et Dany Bloch qui l’exposent à l’ARC. Ses œuvres manifestes croisent la vidéo, la photographie, le dessin et l’écriture en documentant les habitations provisoires des quartiers pauvres d’Istanbul, les prisons de femmes ou l’immigration des familles turques à Paris, sujet de sa série « Exile Is a Hard Job » (1974-2023) qui sera l’objet de son installation à la Biennale de Venise aux côtés de sa yourte emblématique installée au musée d’Art moderne en 1973. « Des sujets sur la défense des femmes et la perte d’identité qui la poursuivent toute sa vie », développe Odile Aittouarès (Galerie Berthet-Aittouarès), qui a rencontré l’artiste en 2018 alors qu’elle était primée par l’association AWARE et qui vient d’ouvrir une exposition dans sa galerie (jusqu’au 9 décembre).
Tout aussi radicales, les œuvres picturales et performatives d’Anna Maria Maiolino ont dénoncé sans relâche la dictature militaire, la censure et la précarité. À la biennale, elle présentera une nouvelle œuvre de grande envergure qui poursuit sa série de sculptures et d’installations en argile débutée dans les années 1990.
JULIE CHAIZEMARTIN